Histoire et Patrimoine

L’histoire de notre petit pays n’est que très partiellement citée dans des documents écrits mais elle peut être découverte en observant notre patrimoine historique, plus conséquent que ne laisseraient présager nos grands espaces déserts. Depuis des millénaires, des habitants ont vécu, travaillé ici ; les différentes civilisations se sont succédé laissant des traces qu’il faut interroger.

Préhistoire

Que sait-on des premiers hommes qui s’établirent en sédentaires sur le plateau de Millevaches ? Bien peu de choses, il faut se contenter d’indices de leur présence. Les tourbières gardent la mémoire de la végétation depuis des millénaires. En effet, les grains de pollen tombant dans la tourbière y sont conservés sans altération par l’eau très acide. Un sondage dans les couches profondes permet de dater et d’identifier les grains de pollen qui donnent une image des plantes présentes à cette date. De telles recherches ont été effectuées dans les tourbières du Plateau, en particulier au Redon Bort autour du ruisseau d’Orluc, à la limite de Pérols et de Bonnefond.

L’étude des couches les plus anciennes montre que le pays était recouvert d’une forêt naturelle dont les essences étaient uniquement déterminées par le climat. Vers le milieu du deuxième millénaire avant notre ère, les hêtres sont dominants. Mais voilà qu’à la fin du millénaire, parmi les pollens de hêtres, ceux des graminées apparaissent : de nouveaux acteurs viennent perturber la végétation naturelle.... ce sont les premiers agriculteurs ! La part de la forêt diminue, preuve de la création de clairières et parallèlement, les graminées se multiplient, signe des premières cultures de céréales et des premiers pâturages. Dorénavant il n’y aura plus de nature vierge mais des paysages façonnés par l’homme.

On ne connait rien de l’habitat de ces premiers sédentaires ; leurs maisons devaient être construites en matière périssable : bois et autres végétaux. Mais ce sont eux qui ont dressé le menhir du Pilard (dans la commune de Bonnefond) et un autre plus petit que l’on voit près de l’église. Ils appartenaient à cette civilisation des pierres dressées, présente ailleurs en France. Ces monuments avaient une signification religieuse que nous ignorons.

Chemins

Ce menhir est dressé au bord d’un ancien chemin de long parcours reliant Rosiers à Pérols et au-delà. Ce chemin existe encore aujourd’hui et a été emprunté de tous temps. Ainsi de nombreux chemins sur le Plateau sont les traces les plus anciennes et les plus persistantes laissées par nos ancêtres. Ces chemins ont durauloisé car ils suivent des itinéraires dictés par la géographie ; ce sont des chemins de hauteur, là où le sol est sec et solide. Ils évitent les fonds de vallées marécageux et ne nécessitent pas d’entretien. Ayant duré des millénaires, devenus depuis peu inutiles, ils sont en voie de disparition. Nous devons sauver ce patrimoine en les aménageant pour les promeneurs et randonneurs.

Avec les gaulois

Nous arrivons à la période historique mais il nous faut encore scruter le sol. Dans les sous-bois on peut trouver des monticules qui ne payent pas de mine : les « tumulus ». Ce sont des tertres funéraires recouvrant des sépultures de l’époque gauloise. Ils sont en groupe de deux ou trois et parfois beaucoup plus, implantés dans des zones élevées et non loin d’anciens chemins. On en trouve un peu partout si on les recherche : près du Pilard à Bonnefond et au voisinage de Clédat. La sépulture proprement dite est au centre, recouverte de petites pierres qui, imbriquées les unes dans les autres, forment un tertre très solide résistant aux outils sommaires de l’ancien temps mais qui sont grandement menacés de destruction par les nouveaux engins agricoles et surtout forestiers. Il est urgent de les répertorier et de tenter de les sauvegarder. Ces nombreuses sépultures indiquent que le pays était alors très peuplé. Mais on n’a pas trouvé de traces d’habitat car les Gaulois construisaient leurs maisons en bois.

L'époque Gallo-romaine

A partir de l’an zéro, les Gaulois fortement influencés par la civilisation romaine construisent maintenant en pierre ; ainsi les ruines de leurs habitations sont plus aisément repérables. Les riches propriétaires terriens firent bâtir des villas semblables à celles de Rome couvertes en tuiles. Et c’est souvent la découverte de débris de tuiles dégagés par les labours qui a permis de déceler la présence des sites gallo-romains. Ces villas, centres de grands domaines agricoles étaient nombreuses sur le Plateau. La plus connue, et entièrement fouillée, est celle des Cars (commune de St Merd-les-Oussines) mais d’autres aussi riches, sinon plus, ont été partiellement explorées : aux Mazières au voisinage de Murat, au champ du Palais près de Bugeat. Bien d’autres sont répertoriées, on en compte en moyenne une par commune actuelle.

La christianisation

L’empire romain ayant sombré sous les coups des invasions barbares, nous entrons au 6ème siècle dans une période obscure. Les constructions, de nouveau en bois, ne laissent pas de traces. Pourtant le Plateau est toujours peuplé, les pollens de la tourbière en témoignent, mais la surface des terres cultivées diminue, la population aussi. Les guerres intestines permanentes, peut-être aussi un changement de climat, expliquent la baisse de l’économie. Pas de traces sur le sol, pas d’écrits sur la situation locale, aussi faut-il avoir recours à l’Histoire générale pour combler cette lacune.

Une autre civilisation commence, l’ère du christianisme. Celui-ci avait atteint les villes de Gaule vers l’an 300, sa diffusion dans des campagnes ne commença qu’un siècle plus tard et ne fut achevé que sous le règne de Charlemagne, au 8ème siècle. La résistance, ou au moins les réticences de la population envers la nouvelle religion expliquent que quatre cents ans aient été nécessaires à son implantation. La population restait très attachée aux anciens cultes gaulois de la nature : les rochers, les arbres, les fontaines. Déçus de ne pouvoir enseigner un christianisme pur, les missionnaires chrétiens finirent par composer avec les traditions locales. C’est ce qui se produisit sans doute à Bonnefond : une bonne fontaine y était très fréquentée et avait même donné son nom au lieu. On décida donc de la mettre sous le patronage d’un saint chrétien, saint Médard, de créer près de celle-ci une église sous ce même patronage, et voilà une nouvelle paroisse chrétienne !

Vers l’an 800, la plupart des paroisses étaient délimitées et ce découpage a été repris lors de la création des communes à la Révolution. Les églises primitives étaient construites en bois et n’ont pas laissé de trace, elles furent ultérieurement rebâties en pierre au même endroit. 

A partir de l’an mil, de grands défrichements

... provoqués par une poussée démographique générale affectèrent particulièrement le Plateau encore en grande partie couvert de forêts et qui avait été un peu délaissé.

Les défricheurs furent souvent des moines auxquels les seigneurs avaient donné, en échange de prières pour leur salut, des espaces forestiers dont ils ne tiraient aucun revenu. Ces donations sont connues car elles furent mises par écrit par les moines.

Dans une zone forestière entre Viam et Tarnac, propriété mal définie donnée par le vicomte d’Aubusson et le comte de la Marche, les moines de l’abbaye de Tulle attirèrent des populations de défricheurs et l’on créa, pour eux, la petite paroisse d’Altoire, aujourd’hui Toy-Viam. D’autres petites paroisses issues de défrichements furent par la suite supprimées : Florentin, Chastagnol près de la Chattemissie dans la commune de Bonnefond.

Les moines cisterciens d’Obazine qui faisaient tous les travaux de leurs mains furent de vrais « moines défricheurs ». Ils aménagèrent la « grange » (domaine) de Chadebec, les traces les plus remarquables qui nous restent de leur activité sont la digue, l’étang et le moulin.

La production stimula les échanges, d’où un regain d’intérêt pour les chemins de long parcours. Sous l’impulsion de l’évêque, on créa à Clédat une maison des pauvres, relais pour les voyageurs sur une partie très déserte d’un grand chemin Nord-Sud. Et on défricha difficilement des terrains rocheux pour cultiver la nourriture distribuée aux passants. Clédat fut une paroisse jusqu’en 1676, date à laquelle elle fut unie à Grandsaigne.

Le Moyen Age

Le Moyen Age a fixé pour longtemps le réseau de bourgs et de villages ainsi que le mode de vie et le paysage. Progressivement des défrichements abusifs avaient presque entièrement détruit la forêt de hêtres, remplacée par d’immenses landes où pâturaient les moutons. Les maisons étaient en torchis et couvertes en chaume, seules les églises étaient en pierre. Après l’an mil, elles furent reconstruites dans le style roman dont il nous reste par exemple l’abside ornée de fresques à Grandaigne qui conserve aussi une chasse reliquaire émaillée, « œuvre de Limoges ». Les autres églises des environs, plusieurs fois remaniées ou reconstruites sont de style gothique tardif.

La guerre de cent ans

Ce fut une catastrophe. Les armées françaises et anglaises et surtout les « routiers » ravagèrent le pays qui ne s’en remit jamais totalement et accusa ensuite un retard dans son évolution. De cette époque date la maison forte de Montamar dont on voit les ruines dans la commune de St Yrieix-le-Déjalat (en contrebas de Clédat).

Après ces malheurs arrivèrent des jours un peu meilleurs.

On restaura les églises et on produisit vers 1500 quelques statues de qualité, ainsi de nombreuses vierges de pitié dont les plus remarquables sont maintenant classées monuments historiques : celle de l’église de Bonnefond et celle de la chapelle de La Bussière.

Certaines croix en granit qui ponctuaient les cimetières, les villages et les chemins, furent refaites et sculptées à cette époque.

Les guerres de religions apportèrent de nouvelles épreuves. Puis une Renaissance tardive amena vers 1600 quelques maisons de notables en pierre (à Pradines, au Chazaloël). Mais il fallut attendre le 19ème siècle pour qu’une petite prospérité permette la construction de nos belles maisons paysannes en granite, telle la chaumière de Clédat.

Cette modeste prospérité ...

... fut sans doute due à la libéralisation de la propriété agricole apportée par la Révolution, à l’arrivée des pommes de terre qui permirent une meilleure alimentation des hommes et du bétail mais aussi à l’émigration. Dans toutes les familles pauvres et moins pauvres, les jeunes gens partaient exercer le métier de scieurs de long dans les forêts des Landes ou de Vendée. Ils partaient en hiver au moment où les travaux agricoles étaient en veilleuse et revenaient pour les foins rapportant leurs menues économies et quelques idées nouvelles glanées pendant leur voyage. Des améliorations utiles en résultaient. L’émigration eut donc un effet bénéfique tout au long du 19ème siècle. Aux ouvriers de la forêt s’ajoutaient les maçons partis à Paris ou à Lyon. Puis ce fut au tour des chauffeurs de taxis. A la fin, ces derniers migrants ne revinrent plus, ils s’installèrent en ville et le pays se vida de ses forces vives. A ceci ajoutons l’hécatombe inscrite sur les monuments aux morts de la guerre de 14.

Pendant la 2ème guerre mondiale, notre pays désert fut propice à la résistance, des villages abandonnés servant de refuge aux combattants.

Et aujourd’hui ?

Le pays a changé, les agriculteurs moins nombreux ont regroupé les terres et élèvent de grands troupeaux en plein air. Les landes abandonnées par les bergères et les moutons ont été plantées de résineux à croissance rapide, sous l’impulsion de Marius Vazeilles. Ces activités demandent peu de main d’œuvre, d’où la diminution de la population. Nous cherchons aujourd’hui à valoriser nos espaces vides en invitant les visiteurs à venir jouir du calme et des beautés de la nature et à découvrir notre patrimoine historique particulièrement bien conservé.